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Image : Élisabeth Verrat, Alban Magd

09.02 —— 05.04.2023

Traverse d'échelle

Le 33, 33 rue Saint-Jacques, 13006 Marseille

La Cartine, 27 rue Saint-Jacques, 13006 Marseille

Elisabeth Verrat
Alban Magd

La pratique d'Elisabeth Verrat et Alban Magd s'est toujours tenue proche des villes. Fascinés par les mystères qu'elles renferment, les histoires qu'elles incarnent, les conflits qu'elles reflètent, les fractures qu'elles génèrent. La dérive et la marche ont eu pour intérêt de les plonger dans les rues comme sur la scène d'un théâtre, pour insuffler un imaginaire entre réel et fiction à la manière d'Italo Calvino dans les villes invisibles. Une quête pour accéder aux cités dans la ville au travers de l'œuvre des architectes et ingénieurs. A force de déambulations, Marseille est devenue pour eux comme un objet trouvé qu'il leur appartenait de comprendre. Durant leur résidence chez Carta, Reichen & Robert Associés, en s'appuyant sur le travail de l'agence, ils ont pu creuser dans ses paysages, au travers de son urbanisme et son architecture. Par la photographie, le dessin et la sculpture, l'enjeu de leur travail réside dans l'intention de réparer par l'imaginaire le palimpseste qui s'est opéré à Marseille au fil des siècles.

Témoignage de résidence​​ :

« En tant que jeunes artistes, l’expérience d’une résidence en entreprise est une chance et une très belle manière de stimuler son champ de recherches, de travail et de création. Nous avions l’un comme l’autre un travail intimement lié à l’architecture et l’urbanisme, par la photo, le dessin, la marche et l’enquête. La résidence en entreprise est un moment d’immersion où l’on va remettre en question nos façons de faire. Un instant où l’on apprend à renouveler des règles de travail, à ajuster et cadrer son temps de recherche, et à travailler avec différents corps de métiers pour alimenter nos réflexions et concrétiser nos productions. C’est un véritable laboratoire expérimental, un moment où le temps s’arrête pour mettre en chantier le regard que nous avons sur notre pratique artistique. C’est un moment d’errance que nous avons traversé aussi bien au travers de la marche et du mouvement, qu’au travers du 20 rue Saint-Jacques devant notre ordinateur. Ce temps de résidence en entreprise nous a permis de beaucoup marcher, parfois comme si nous étions avec des fantômes de l’histoire marseillaise, d’autre fois, on a eu l’impression de devenir nous aussi des fantômes qui observions la ville par le prisme de l’agence Carta Reichen et Robert Associés. Nous avons pénétré cette grande ruche d’architectes et d’ingénieurs, nous les avons espionnés dans leur silence face à leur ordinateur, au rythme des cliquetis des souris. Nous nous sommes plongés dans leur réseau d’archives, balayant les projets passés, en cours et à venir. Nous avons arpenté le sol des chantiers de l’agence qui nous ont permis de constituer un vocabulaire de formes et d’idées. Nous avons observé le « grand bazar » marseillais depuis le plancher des premières dalles jusqu’au dernier caillebotis des plus hauts échafaudages. Nous avons passé trois mois à nous documenter, enquêter, marcher pour essayer de mieux comprendre et écouter. Trois des projets emblématiques de l’agence ont défini notre territoire d’investigations qui allait devenir le théâtre de nos pérégrinations et enquêtes pour déceler les visages oubliés ou invisibles de Marseille : la Poste Colbert, le Fort Saint-Jean et le Silo. On a voyagé dans le temps, entre passé - présent et futur, entre rénovation et construction. Nous étions devenus comme des espions qui laissaient vagabonder leurs oreilles ici, leurs yeux par là, pour collecter le plus d’informations possible. Une fois dans notre atelier, nous nous sommes laissés dépasser par la complexité de ce que nous avions collecté, nous avions fabriqué d’étranges chimères. Nos créations ont détourné le réel pour poser un regard nouveau, traversant et inattendu sur les activités de l’entreprise. Quand les architectes dessinaient et imaginaient leurs plans, puis qu’ils passaient en volume avec la maquette, nous cherchions à prolonger ces moments par l’imagination à travers la matière. Comme on traverse un paysage, nous avons souhaité traverser l’agence Carta Associés. Cette traversée horizontale de l’agence nous a permis de coulisser à l’intérieur d’elle en décidant de nous intéresser à tel ou tel autre cadrage. Notre observation ne se faisait pas au travers d’un télescope mais plutôt au travers d’un microscope qui nous permettait de creuser l’invisible et d’accéder à chaque différentes strates des projets de l’agence. Cette résidence nous préférons l’appeler ‘’traversée en entreprise’’ c’est un moment sans limites et sans frontières, nous ne faisons que créer des lisières, qui ont transformé la traversée horizontale en une traversée verticale, comme si nous contemplions Marseille depuis ses plus hautes architectures. À la question pourquoi prendre un artiste en résidence dans son entreprise, il n’y a pas vraiment de réponse possible. L’artiste ne part jamais avec un projet prédéfini, car s’il partait avec un scénario déjà établi, le trajet serait immédiatement contrarié. L’artiste interprète constamment ce qu’il ne comprend pas, il infiltre un espace inconnu en s’interrogeant sur ce qu’il y a derrière les murs de l’entreprise dans laquelle il pénètre. En revanche, ce que nous pouvons dire c’est que nous remercions Madame et Monsieur Carta, ainsi que l’agence Carta Reichen et Robert associés de nous avoir permis cette traversée par la marche et l’observation et de nous avoir permis de comprendre que parfois, ne rien savoir, ne rien comprendre, est une forme de savoir. »

Texte :  Élisabeth Verrat, Alban Magd

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